LES R.L.B.

Plusieurs années de travail acharné, dans des conditions matérielles et morales de plus en plu
pénibles, suivent la découverte des ARN antiviraux. Elles vont être employées à explorer lef
immenses possibilités du découpage d'ARN naturels de grande taille en fragments de
caractéristiques différentes. Pour faire varier leur composition, l'équipe va utiliser des
ribonucléases diverses, choisies pour leur propriété de couper les chaînes de nucléotides au
niveau de bases distinctes; elle va étudier l'influence de l'origine des ARN ribosomiques
soumis au découpage, de la taille des fragments, de la nature des nucléotides qui les composent
sur les activités in vitro et in vivo de ces ARN courts. Les travaux sur les ARN-fragments
amorceurs de la réplication de certains bactériophages ont permis de préciser l' importance des
nucléotides terminaux situés à l'extrémité 3'0H (la formation d'un polynucléotide progresse,
rappelons-le, de l'extrémité S' vers l'extrémité 3').

Beljanski continuera ses recherches sur les amorceurs et offrira de nouveau à la médecine un
médicament inédit, révolutionnaire. Parallèlement, il va mener, avec ses collaborateurs, des
investigations novatrices dans le domaine fort complexe de la cancérogenèse végétale. Nous
avons choisi de parler d'abord de la mise au point du nouveau remède: les RLB.

Nous sommes entrés dans la seconde moitié des années 70. Les traitements anticancéreux,
désormais bien codifiés, font appel à la radiothérapie et à une chimiothérapie lourde. Même
lorsque ces traitements ne les visent pas directement, les cellules sanguines y sont
particulièrement sen sible s et y ré sistent mal : le taux de s globule s blanc s s ' abais se
dangereusement, laissant le champ libre aux infections; la diminution du nombre des
plaquettes entraîne des hémorragies. Les soins doivent donc être interrompus périodiquement,
pour permettre aux organes hématopoiétiques de récupérer, et ces arrêts mettent en péril
l'efficacité du traitement. Aucun des remèdes proposés pour entraver la chute des globules
blancs et des plaquettes n'a justifié les espoirs qu'il avait suscités.

Beljanski et ses collaborateurs recherchent donc si, parrni leurs amorceurs, certains ne
pourraient pas agir sur la multiplication des cellules sanguines.

Ils testent différents ARN-fragments en présence d'ADN extraits de moelle osseuse et de rate
de mammifères, lieux où se forment les leucocytes et les plaquettes. Ils parviennent ainsi à
isoler des ARN-fragments qui se comportent en amorceurs sélectifs d'ADN extrait des organes
hématopoiétiques, mais qui sont inactifs sur la réplication d'ADN de cerveau, de poumon, de
muscle du même animal. Injectés à ce dernier, ces fragments se concentrent au niveau de la rate
et de la moelle osseuse, dans lesquelles, comme le constate l'équipe, le nombre des globules
blancs et des plaquettes augmente.

Les ARN-fragments testés n'ont malheureusement aucun effet sur la formation des globules
rouges; parmi les cellules sanguines, ceux-ci sont néanmoins les derniers à être détruits par les
effets secondaires des traitements anticancéreux. Les globules rouges, on le sait, assurent le
transport de l' oxygène dans l' organisme. Cette fonction les rend indispensables à la synthèse
des globules blancs et des plaquettes. Aussi les ARN-fragments qui stimulent la formation de
ces deux types de cellules ne peuvent-ils plus exercer leur action si le nombre des globules
rouges est par trop diminué.

Comme le prouvent d'autres expériences, les nouveaux ARN-fragments ne stimulent que la
réplication de 1'ADN normal; ils demeurent sans effet sur la réplication d'ADN provenant de
tissus cancéreux, même de cellules leucémiques. Des essais in vivo sur des souris porteuses de
diverses tumeurs cancéreuses confirment les résultats des essais in vitro.

N'est-il pas possible, au moyen des ARN-fragments, de faire remonter les taux des leucocytes
et des plaquettes lorsqu'une radiothérapie ou une chimiothérapie a provoqué leur
effondrement ?

Une expérimentation approfondie est entreprise chez l' animal. Des lapins sains vont d'abord
être soumis à des doses d'antimitotiques dont les effets secondaires sur les cellules sanguines
peuvent être mortels pour ces animaux. Les expérimentateurs ont choisi des produits
couramment employés chez l'homme: l'Endoxan, qui contient 75 % de cyclophosphamide, et
le méthotrexate, tous deux spécialement dangereux pour les globules blancs; la daunorubicine,
particulièrement néfaste aux plaquettes.

L'Endoxan est injecté au lapin par voie intraveineuse à des doses quotidiennes quarante fois
supérieures, par rapport à leur poids, à celles que reçoit habituellement un malade humain en
une semaine. Cent milligrammes par jour d'Endoxan causent un tel appauvrissement en
globules blancs chez un lapin de 3 à 4 kg qu'il peut mourir au bout d'une dizaine de jours; en
une semaine, le taux de ses leucocytes tombe de 7000-12000 par mm3 (il y a de fortes
variations individuelles) à S 000 ou même 3 000.

A ce moment, une seule injection de 1 à 6 mg d'ARN-fragments est administrée: le taux des
leucocytes remonte et, en 24 à 48 heures, il est redevenu normal. I1 restera normal pendant
environ une semaine, bien que le lapin continue à recevoir tous les jours sa dose d'Endoxan. I1
suffira d'une injection d'ARN-fragments par semaine pour que le nombre de leucocytes
demeure normal.

Ces ARN-fragments vont être désignés par le sigle RLB, c'est-à-dire "Remontent-Leucocytes
Beljanski" (parce qu'ils font remonter le taux des leucocytes).

Des lapins qui ont reçu quotidiennement 100 mg d'Endoxan pendant 4 à 8 semaines et l'un
deux pendant 81 jours ont été conservés en bonne santé, avec un taux leucocytaire normal,
grâce à une seule injection hebdomadaire de 2 à 4 mg de RLB et parfois seulement de 0,5 mg.
L'Endoxan a dû être interrompu quand le taux de globules rouges, moins vulnérables à
l'antimitotique, mais sur lesquels, rappelons-le, les RLB n'agissent pas, est tombé à un niveau
trop bas. Une fois les essais terminés, les lapins ont continué à vivre en bon état, après avoir
reçu des doses d'antimitotique infiniment plus élevées qu'en thérapeutique humaine, qui n'ont
entraîné aucun effet secondaire au cours d'un suivi d'une à deux années après la fin des
expériences.

En outre, l'équipe observe que les RLB combattent le déséquilibre induit par l'Endoxan,
comme par d'autres médicaments, dans la formule leucocytaire. En effet, lors du traitement
antimitotique, les polynucléaires, largement responsables de la défense contre les microbes,
disparaissent plus vite que les lymphocytes. Chez le lapin sain, ces deux catégories de globules
blancs sont présents en proportions à peu près égales. Une semaine d'administration
d'Endoxan réduit le nombre des polynucléaires à 18 % du nombre total de leucocytes. A ce
moment, une injection intraveineuse unique de S mg de RLB rétablit en l'espace de 4 ou
S heures l' équilibre normal entre polynucléaires et lymphocytes. L' effet dure plusieurs jours et
l'équilibre peut être maintenu facilement par l' administration des mêmes doses de RLB à
intervalles réguliers.

Pour étudier l'action des RLB sur les plaquettes sanguines, le nombre de celles-ci a été diminué
à l' aide de daunorubicine, employée, ici encore, en quantités proportionnellement bien
supérieures à celles utilisées en médecine humaine. Chez le lapin, l' injection intraveineuse de
1,5 mg/kg de daunorubicine pendant 4 jours consécutifs provoque un abaissement du taux
plaquettaire tel que l' animal meurt d'hémorragie en 6 à 8 jours. En une semaine, le nombre des
plaquettes peut tomber de 400000 par mm3 à 15000 par mm3. I1 faut alors deux injections de
5 mg de RLB accompagnées d'une prise de 20 mg par voie orale pour augmenter le nombre
des plaquettes, qui retrouve sa valeur normale 5 à 6 jours après la seconde injection. Ensuite,
pendant plusieurs semaines et sans autre administration de RLB, de nouvelles injections de
daunorubicine resteront sans action sur le taux plaquettaire.

La répétition des doses de RLB n' a entraîné aucune accoutumance, ni chez les lapins traités par
les antimitotiques, ni chez les témoins. Chez ces derniers, dont les nombres de globules blancs
et de plaquettes sont normaux, les RLB provoquent une remontée des taux qui n'excède jamais
100 % des valeurs normales et qui est corrigée en 24 heures par une puissante régulation
naturelle.

Même avec des doses de RLB extrêmement fortes - jusqu'à 50 mg à la fois - ou répétées à des
intervalles très rapprochés, il n'existe aucun danger de voir s'établir des taux anormalement
élevés de leucocytes et de plaquettes. Une régulation semblable s'effectue d'ailleurs également
chez les animaux sous chimiothérapie: une nouvelle dose de RLB ne peut avoir d'effet que
lorsque la dose précédente a cessé d'agir.

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Traitement par chimiothérapie classique d'un malade atteint de leucémie
Iymphoblastique. Les RLB (=BLRs) ont été administrés par la voie perlinguale,
une dose par jour (résultats non publiés).

I1 n'y a pas non plus de "choc en retour", de phénomène de rebond: la cessation du traitement
par les RLB n'entraîne chez les témoins aucun trouble de la formule sanguine.

Des expériences menées chez des souris atteintes de différents cancers et traitées par l'Endoxan
ont montré que les RLB n'entravent aucunement l'action de l'antimitotique sur les cellules
tumorales et qu'ils protègent aussi bien les cellules sanguines des animaux malades (en dehors,
bien entendu, des cellules leucémiques) que celles des témoins.

Les RLB sont actifs par les voies intraveineuse, intramusculaire, intradermique, sous-cutanée
et orale; dans ce dernier cas, les doses doivent être doublées, mais l'effet, légèrement retardé
au début, dure néanmoins plus longtemps. Les doses de RLB, qui doivent évidemment être
adaptées à chaque type de médicament dont on veut combattre les effets secondaires nocifs sur
le sang, sont toujours très faibles, inférieures au mg/kg.

La découverte des RLB est annoncée le S juin 1978 à l'Académie des Sciences et le lendemain
à l'Académie de Médecine par le Professeur Lépine.

Evidemment, la découverte d'un ARN-fragment capable non seulement de rétablir des taux
normaux de globules blancs et de plaquettes lorsque ceux-ci se trouvent diminués, mais encore
de rendre à la formule leucocytaire son équilibre, un produit non toxique, d'origine naturelle,
un composé dont l'action est physiologique et dont les étonnantes propriétés ont surpris même
ses inventeurs est accueillie avec le plus grand scepticisme et une hostilité marquée par les
tenants de la biologie ''officielle''.

Première objection: les RLB ne sont rien d'autre qu'une variété d'endotoxine bactérienne.
Faux, répond Beljanski: les endotoxines ne font que libérer rapidement dans le sang une
décharge fugace de granulocytes déjà formés et mis en réserve; en raison de cela, l'effet
s'épuise au bout de 4 ou 6 injections. Au contraire, l' augmentation leucocytaire due aux RLB
demande 24 heures pour s'établir et dure ensuite une semaine; le processus causal, une
stimulation de la réplication de 1'ADN des cellules-souches des globules blancs, n'a rien à voir
avec la réaction de type allergique causée par l'endotoxine. Enfin, cette dernière n'a aucun effet
sur la formation des plaquettes, que les RLB, en revanche, stimulent.

Alors, c'est que les RLB agissent à la manière des phytohémagglutinines. Non, objecte
Beljanski: ces extraits végétaux ne font que provoquer, dans une culture cellulaire, la
transformation de certains types de leucocytes en lymphoblastes (cellules-souches
lymphocytaires), dédifférenciation qui ne se produit jamais sous l'influence des RLB.

Ce qui explique sans doute l'action remarquable et l'absence de toxicité des RLB, pense leur
découvreur - et l'hypothèse est étayée dès cette époque par un nombre croissant d' observations
- c 'est que les ARN-fragments, dans leur ensemble, sont des substances que l' organisme de
l' animal et de l'homme sait normalement fabriquer en réponse à des stimulations très variées
pour agir dans des réactions biochimiques bien définies. C'est une des raisons pour lesquelles,
pour préparer les RLB, ainsi que, du reste, la plupart des ARN-fragments, Beljanski a choisi
comme matière première E. coli, bactérie dont les souches non pathogènes sont indispensables
au métabolisme intestinal de l'homme, et, comme "outil de découpage" des ARN ribosomiques,
la ribonucléase pancréatique, enzyme d'une importance majeure pour l'organisme.

Déjà, lorsque fut annoncée la découverte des RLB, certains malades avaient pu bénéficier, avec
d'excellents résultats, d'un traitement à l' aide de ces ARN-fragments, car, en raison de leur totale innocuité, des médecins les avaient utilisés sans crainte dans des cas où ils représentaient
l'unique solution.

Depuis ces premiers temps, les RLB ont fait leurs preuves et tenu leurs promesses. Ils ont
protégé des patients sous radiothérapie et sous chimiothérapie intensive, leur permettant de
suivre leur traitement antimitotique sans effets secondaires sanguins, en menant une vie
normale, sans même interrompre leur travail"'; ils ont aussi sauvé des malades atteints
d'aplasie médullaire, congénitale ou iatrogène.

Parce que les RLB se fixent faiblement au niveau des glandes surrénales, ils exercent sur elles
une légère action, qui se traduit par une stimulation de l'organisme entier; elle demeure dans
les limites physiologiques et ne provoque pas d'effet nocif. En outre, dans les années récentes,
l' équipe a démontré que les RLB favorisent l' apparition de lymphocytes tueurs (natural killers
des Anglo-Saxons) qui s'attaquent aux cellules cancéreuses.

Pendant toutes ces années, tandis que Beljanski luttait pour obtenir les moyens de développex
les RLB, auxquels la Direction de l'Institut Pasteur, encore une fois, ne s'était pas intéressée,
tandis que l'équipe, débordée, s'efforçait, sans toujours y parvenir, de produire suffisamment
de RLB pour sauver les malades, leurs adversaires, les tenants du dogme, de plus en plus jaloux
et haineux, accumulaient sans relâche des obstacles sur leur route.

La période de la mise au point des RLB est un des épisodes les plus laids de cette longue
guerre. L'influence des ennemis de Beljanski était si grande que des scientifiques qui ne le
connaissaient pas, qui ignoraient ses travaux, ses publications, se dressaient contre lui dans les
commissions officielles et dans les comités de lecture; des médecins hospitaliers, après lui
avoir promis une entrevue, ne se présentaient pas à des rendez-vous qu'ils n'avaient pourtant
pas décommandés. I1 y eut encore bien d'autres manifestations, souvent très graves, de cette
hostilité envers Beljanski, qui englobait ses collaborateurs proches ou lointains et s'étendait
jusqu'au-delà de nos frontières. Entre-temps, des patients continuaient à souffrir et à mourir,
alors qu'ils auraient pu être sauvés.

(1) Ceci, à condition de recevoir des RLB suffisamment tôt au cours de leur thérapeutique antimitotique. En effet,
en l'absence de cette protection, de nombreuses cellules sont détruites et, pour se débarrasser de leurs restes,
I'organisme synthétise des ribonucléases. CElles-ci, au cours d'un traitement de longue durée, deviennent
extrêmement abondantes. Des RLB administrés trop tardivement seront immédiatement dégradés par ces
ribonucléases.

RÉSUMÉ

Beljanski découvre les RLB (Remontent-Leucocytes Beljanski). Ces ARN-fragments
amorceurs stimulent de façon spécifique la formation des globules blancs et des
plaquettes.

La plupart des traitements anticancéreux ont un effet secondaire destructeur sur ces
cellules sanguines. Les RLB offrent, pour la première fois, le moyen non seulement
de maintenir des taux normaux de globules blancs et de plaquettes pendant une
radiothérapie ou une chimiothérapie, mais également de préserver les proportions
normales des différents types de globules blancs, en particulier de ceux qui luttent
contre les infections.

Une longue période d'essais chez l'animal montre que les RLB sont effficaces à faible
dose, par de nombreuses voies d' administration, et qu'ils ne présentent aucune
toxicité. Les malades qui ont pu recevoir des RLB pendant leur traitement
antimitotique ont pu, protégés de ses effets secondaires sur le sang, mener une vie
normale. Les RLB sont également effficaces contre certaines déficiences congénitales
(aplasies) de la moelle osseuse, qui fabrique les cellules sanguines. Ils sont
néanmoins sans effet sur les globules rouges.

Les RLB n'agissent que sur l'ADN des cellules saines, jamais sur celui des cellules
cancéreuses (leucémiques, par exemple). Ils n'entravent aucunement l'effet des
antimitotiques sur les cellules cancéreuses.

Les RLB, pense Beljanski, font partie d'un ensemble de substances qu'un organisme
animal ou humain en bonne santé sait fabriquer pour prendre part à des réactions
biochimiques bien définies.

L'annonce de la découverte des RLB est accueillie avec scepticisme ou hostilité.
Beljanski démontre qu'il ne s'agit ni d'interféron, ni d'endotoxine bactérienne, mais
bien d' ARN-fragments originaux. Une fois encore, la Direction de l' Institut Pasteur
refuse de s'intéresser au remède. La haine contre Beljanski et ses collaborateurs est à
son comble et la persécution dont ils sont victimes prend des proportions
invraisemblables, tandis que meurent des malades qui auraient pu être sauvés.